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La “Royauté sacrée” : une fiction épistémique

Voici un des mauvais tours que nous jouent les langues étrangères dans la compréhension africaine du monde et surtout de l’Afrique. Des Blancs rencontrent des institutions et pratiques politiques africaines qu’ils s’empressent de décrire avec les mêmes mots et concepts que ceux en usage pour penser leur propre trajectoire politique. Ce n’est pas parce que ce sont des Blancs qu’ils procèdent ainsi ; c’est qu’en général les hommes décrivent ce qu’ils voient avec les moyens de leurs propres ressources linguistiques, même lorsque en l’état celles-ci n’y conviennent pas.

Ainsi de la soi-disant « royauté sacrée » : en occident le Roi est une institution politique, et seulement cela. D’ailleurs, historiquement, c’est un chef de guerre qui a circonscrit un territoire par la force, dont il administre biens et personnes au profit de sa gloire. Lorsqu’ils rencontrèrent le Manghan, le Mansah, le Mwene, le Mogho, ou le Fari, les Blancs crurent trouver une version africaine du « Roi ». Mais ces institutions, similaires entre elles (idéologiquement et fonctionnellement) sont radicalement différentes de la royauté occidentale.

Aussi, ceux des Blancs les plus avisés qui se sont aperçus de cette différence radicale, ont élaboré le concept ( ?) de « royauté sacrée » pour en rendre compte. En effet, depuis le Fari jusqu’au Mogho, en passant par le Mansah, l’administration des affaires publiques est assurée en Afrique, depuis des millénaires, par une institution simultanément politique et spirituelle, c’est-à-dire « royale » et en même temps « sacrée ». C’est qu’en Afrique, pour le dire à la manière d’Alain Anselin, « le guide des morts est le père des rois » !!!

Bien évidemment, certains auteurs occidentaux ont considéré cela comme un état « primitif » de la royauté en Afrique, qui ne pouvait qu’évoluer vers les formes attestées en occident…Elucubrations eurocentristes à écarter d’emblée : il s’agit d’institutions inspirées par une autre manière de penser et de vivre le monde, qui ont administré pendant des millénaires (avant même qu’il n’y eût de « roi » en Europe ), partout en Afrique, des sociétés politiques pérennes, prospères et puissantes ; apportant ainsi la preuve irréfutable de leur efficacité : Le Wagadu de Manghan Moussa était à son apogée au IXè siècle lorsque Charlemagne tentait en vain de fonder son empire. De même, au XIIIè siècle, le Mali du Mansah Sundjata était parmi les trois sociétés politiques les plus puissantes et prospères au monde. Et je ne parle même pas de Kemet du temps de Fari Râ Mosê II…

Piège de la langue ? Assurément oui, car le mot de « roi » est inadapté pour « dire » la réalité de « Fari » ; laquelle n’existe tout simplement pas dans le monde du « roi ». Dommage pour tous ces érudits qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour instruire une « curiosité institutionnelle » procédant d’abord d’une illusion linguistique, telle que le « Mansah » devient ce qu’il n’est pas, « roi ». Après, on peut pondre une prolifique littérature savante pour savoir pourquoi le Mansah est autrement que le roi, c’est-à-dire tel qu’il n’a jamais cessé d’être, Mansah. Il est aisé alors de voir qu’une telle littérature passe à côté de l’essentiel, à vouloir penser le Mansah dans les termes hétérogènes du roi, plutôt que, par exemple, comparativement au Fari dont on dispose par ailleurs d’une abondante documentation millénaire. Où le piège devient une impasse méthodologique.

En outre, pourquoi dire « roi sacré », plutôt que « prêtre royal », étant donné que les fonctions spirituelles sont au moins aussi importantes que les fonctions profanes du Mwene ?

En définitive, « la royauté sacrée » n’a jamais existé que dans l’esprit, et dans la langue savante, de ceux qui l’étudient : une fiction épistémique. Historiquement n’existent que des Mansah, Fari, Mwene, etc. à ne surtout pas confondre avec le Roi, fût-il affublé de l’épithète « sacré ».


Par Ogotemmêli

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