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Le budget 2008 de la Côte d’Ivoire est sous obédience ultralibéraliste

A la fin de l’exercice fiscal 2008, en novembre plus précisément, la Côte d’Ivoire devrait connaître des élections présidentielles. Celles-ci marqueraient le véritable début de la sortie d’une crise politique de quinze ans, qui a pris des tournures très dramatiques au cours des six dernières années. A cet égard, le budget 2008 est particulièrement crucial, dans la mesure où il constitue un tournant majeur, aussi bien dans la volonté de transparence budgétaire des autorités ivoiriennes, qu’en tant que charnière fiscale : entre cette longue période tumultueuse de l’après-Houphouët-Boigny, et une ère post-crise dont il porte quelques augures. Ce sont ces derniers que nous allons tenter ici de déceler.

Un budget en augmentation de 8.55%

Dans un document de la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique (DGTCP) intitulé « Autre ressources et situation récapitulative des recettes du budget 2008 » [1], M. Koné Adama – directeur général-adjoint de la DGTCP – a présenté les grandes masses du budget de la Côte d’Ivoire pour l’exercice fiscal 2008, de même que la contribution aux recettes budgétaires des ressources autres que les principaux impôts et taxes.

En 2008, les « autres ressources » du budget ivoirien s’élèvent à un montant total de 557.9 milliards de francs CFA (contre 555.8 en 2007), dont 40 milliards dûs à la SIR (Société Ivoirienne de Raffinage), 95.4 milliards d’emprunts sur les marchés monétaires ; et surtout 386.6 milliards de ressources extérieures sous forme de « prêts-projets », « dons-programmes », « échéances rééchelonnables » ou des « appuis budgétaires » d’institutions internationales. Ainsi, le FMI contribue pour 29.8 milliards, la Banque Mondiale pour 16.7 milliards et l’Union Européenne pour 11.9 milliards [2]. Globalement, les prévisions de recettes pour 2008 ressortent à 2129.1 milliards de francs CFA, contre 1961.3 milliards en 2007 ; soit une augmentation de 8.55%. Ce qui est indéniablement remarquable pour un pays en crise.

C’est donc cette bonne nouvelle, d’une très sensible croissance budgétaire en 2008, que le ministre ivoirien de l’Economie et des Finances, M. Charles Koffi Diby, a voulu partager avec un large public, lors d’une conférence de presse à l’auditorium de la CAISTAB, le vendredi 4 janvier courant. Ses principaux collaborateurs (Mme Sarata, M. Kouassi Kouamé et M. Gnamien Konan) [3] en ont profité pour détailler les grandes masses de ce budget. Où l’on apprend que 82% des recettes attendues proviendraient de la mobilisation des ressources intérieures ; les 386.6 milliards de ressources extérieures ne représentant que 18% du total de recettes.

Cela traduit une forte indépendance budgétaire de la Côte d’Ivoire à l’égard de la « générosité internationale », et corrélativement une bonne capacité de l’économie nationale et des contribuables ivoiriens à financer l’action de l’Etat. Toutes choses expliquant d’ailleurs que ce pays ait continué à assurer la quasi totalité de ses charges de fonctionnement, notamment les salaires des agents du Service Public, malgré la grave crise qu’il affronte depuis le putsch manqué du 19 septembre 2002. Ailleurs en Afrique, il en faudrait beaucoup moins pour que les salaires des fonctionnaires subissent des retards de paiement, et que les « délestages » de la fourniture d’eau et électricité se multiplient dans les grandes agglomérations. S’agissant des dépenses, 680.5 milliards iront aux charges de personnel (soit 32%), 555.9 milliards seront consacrés au service de la dette publique (soit 26.1% des recettes), 501.1 milliards aux dépenses de fonctionnement (soit 23.5%), 353.2 milliards à l’investissement public (soit 16.6%), et enfin 38.4 milliards paieront les divers abonnements de l’Etat (soit 1.8%).

Par ailleurs, il convient de préciser que l’élaboration de ce budget 2008 a été très étroitement suivie (pilotée ?) par « les institutions de Bretton Woods », qui ont imposé le respect de leur orthodoxie budgétaire comme un préalable à la « normalisation » des relations financières avec les autorités ivoiriennes. Ainsi, ce budget récite l’orthodoxie budgétaire des institutions de Bretton Woods, dont il est pourtant acquis qu’elle a aggravé la misère dans tous les pays qui l’ont suivie servilement [4].

Deux rubriques retiennent particulièrement notre attention dans cette présentation enthousiaste de leur budget 2008 par les argentiers ivoiriens, devant un parterre d’invités où trônaient en bonne place les représentants locaux du FMI et de la Banque Mondiale.

Une Dette-Boulet

D’une part, le montant faramineux du service de la dette, qui est largement supérieur à celui des ressources extérieures, avec respectivement 555.9 milliards contre 386.6 milliards. Soit un transfert net de 169.3 milliards de francs CFA aux « bailleurs de fonds » internationaux, notamment le Club de Paris, la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire International. En d’autres termes, un pays en grave crise politique comme la Côte d’Ivoire se voit obligé de rembourser des dettes qui lui avaient été imposées par les fameux stratèges des Programmes d’Ajustement Structurel. Or, dans son contexte actuel, particulièrement crucial, la Côte d’Ivoire a grand besoin de toutes ses ressources budgétaires intérieures, en vue de surmonter progressivement quinze années de marasme économique et d’instabilités institutionnelles persistantes.

Pis, au cours des six dernières années, l’affaiblissement de l’Etat de Côte d’Ivoire par un putsch manqué, a permis l’émergence d’une économie de guerre (ou plus exactement de rébellion) parrainée par la Françafrique, qui a siphonné le potentiel fiscal de la moitié nord du pays, détournant des convois routiers de produits de rente ou miniers vers ses voisins du Mali, Burkina Faso et Ghana. Cette crise a également sapé les infrstructures publiques de ce pays, pénalisant l’entretien des routes, bâtiments et autres équipements publics.

Paradoxalement, en réponse à un telle saignée criminelle, le budget 2008 transfert 169.3 milliards de francs CFA à des pays et organismes dits « amis », dans le même temps où le président de la république, Laurent Gbagbo, sollicitait solennellement – dans l’enceinte des Nations Unies – l’aide de « la communauté internationale », afin de financer la sortie de crise en Côte d’Ivoire. Ainsi, non seulement les soi-disant « bailleurs de fonds » lui reprennent d’une main ce qu’ils feignent de lui donner de l’autre, mais encore ils extorquent 169.3 milliards de francs CFA à un pays à genoux, comme pour achever économiquement ce qu’un coup d’Etat n’avait pu réaliser politiquement.

Trop faible effort d’investissement

D’autre part, avec 16.6% du budget alloué à l’investissement, c’est presque 10 points d’indice en moins par rapport aux 26.1% consacrés au service de la dette. Ainsi, dans sa hiérarchie des priorités budgétaires, le pari sur l’avenir des Ivoiriens est relégué bien loin par le Gouvernment, comparativement au souci de se soumettre aux exigences financières à court terme des institutions de Bretton Woods. Pourtant, le Lycée Scientifique de Yamoussoukro, fleuron de l’Education Nationale d’excellence à l’ivoirienne, est dans un état lamentable de décrépitude avancée. Or, cet exemple, qui a déjà plus de vingt ans, aurait dû avoir été multiplié dans les quatre coins du pays depuis longtemps.

En d’autres termes, voici un pays gravement malade, qui consacre une part excessive de ses moyens intrinsèques au remboursement de dettes extérieures maintes fois remboursées, plutôt qu’à panser vigoureusement ses maux socio-économiques aggravés par six ans de crise putschiste. Faut-il comprendre par là que l’un des principaux facteurs de sortie de crise en Côte d’Ivoire consisterait dans la subordination de sa politique économique aux diktats d’institutions ou puissances étrangères ? Noter que 386.6 milliards de « dons-programmes », « prêts-projets » et autres « appuis budgétaires » externes, c’est à peu près l’équivalent des 353.2 milliards de budget d’investissement. A croire que la stratégie ivoirienne d’investissement public serait particulièrement corrélée avec ses relations financières étrangères.

En somme, la Côte d’Ivoire serait apparemment indépendante sur le plan budgétaire, surtout lorsqu’il s’agit de payer les salaires des fonctionnaires (32%) ou d’assurer les dépenses publiques de fonctionnement (23.5%) ; par contre sa politique économique, notamment sa stratégie d’investissement public, serait mise sous tutelle par ses « partenaires internationaux ». D’autres données économiques viennent au soutien de cette hypothèse, à savoir le retour en force d’opérateurs économiques françafricains (Bouygues, Bolloré, Sagem, Orange, etc.), à travers la signature ou le renouvellement de gros contrats négociés de « gré à gré », sans appel d’offres publiques internationales : comme de sinistre coutume dans le « Pré Carré » français…

En tout état de cause, il n’est pas économiquement raisonnable qu’un pays si faiblement industrialisé, ayant une masse monétaire abusivement contractée par « la garantie de change » chèrement payée au Trésor Public Français, consacre une si maigre part de son budget aux investissements publics. Bien au contraire, dans l’histoire économique de l’industrialisation, ce sont les interventions publiques massives et durables (sur plusieurs décennies), dans les secteurs d’activité prometteurs ou stratégiques, qui ont crée partout les conditions d’émergence d’un tissu industriel de plus en plus dense et varié : sans l’Etat, l’industrie nucléaire française n’existerait pas, ni ne serait l’une des toutes meilleures au monde ; sans l’Etat, point de TGV, ni d’Ariane, ni d’Airbus, ni de Rafale, ni de Gazelle, ni même d’industrie automobile française, etc.

Ce budget 2008, qui s’épuise encore à rembourser des dettes, est comme destiné à solder de vieux comptes, en vue de la sortie de crise. Mais est-ce réellement dans l’espoir de prendre un nouvel envol demain ? A quel prix, et selon quel audace stratégique budgétaire ? Une franche émancipation de l’obédience ultra-libéraliste serait indispensable à la Côte d’Ivoire pour retrouver les chemins de la prospérité économique et du développement endogène.

Par KLAH Popo, Mai 2008

NOTES

[1] Koné Adama, Autre ressources et situation récapitulative des recettes du budget 2008, Ministère de l’Economie et des Finances, communication de la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique, Abidjan CAISTAB, 03 janvier 2008. Ce document est disponible sur le site de la DGTCP, à l’adresse suivante :

http://www.tresor.gov.ci/actualites/article.asp?n=1267

[2] Koné Adama, op cit, p.4 : « Les ressources extérieures attendues en 2008 totalisent 386,6 milliards contre 408,4 milliards en 2007, soit une baisse de 21,8 milliards. Elles concernent :

– les échéances rééchelonnables de la dette (Club de Paris, Créanciers privés) :

201,1 milliards en 2008 contre 118,1 milliards en 2007 ;

– les appuis budgétaires : 58,4 milliards en 2008 contre 174,7 milliards en 2007. Ces appuis budgétaires ont trait au FMI (29,8 milliards), à la Banque Mondiale

(16,7 milliards) et à l’Union Européenne (11,9 milliards) ;

– les prêts-projets : 32,7 milliards en 2008 contre 40,4 milliards en 2007) ;

– les dons-projets et dons-programme : 94,3 milliards en 2008 contre 75,2 milliards en 2007. »

[3] Mme Sarata est la Directrice générale adjointe des impôts ; M. Kouassi Kouamé est le Directeur général du budget et des finances ; M. Gnamien Konan est le Directeur général de l’administration douanière.

[4] Joseph Eugene Stiglitz, La grande désillusion, éd. Fayard, 2002.

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